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LOS ALCAZARES 1 : Noyés à Los Alcazares


Un voyage, c’est une part d’aventure, celui-là partait d’une rupture. Ces derniers jours au Maroc ont été marqués par l’émotion. Agadir avait tissé ses liens d’habitudes et d’amitié. Pourtant il me tardait de partir. En faisant cela j’arrachais Françoise à une part de sa vie…


Partir contrairement au dicton, ce n’est pas mourir un peu, c’est ouvrir une nouvelle porte sur la vie ; une autre tranche de vie et secrètement je pense toujours : des moments encore plus intenses que ce que je quitte.


Ce début de voyage s’est fait plus rapidement que souhaité pour moi mais il était important de se rapprocher rapidement de la maman de Françoise. Elle souhaitait aussi savoir comment ce serait à Fuengirola et …plus loin à Murcia. La dame n’aime pas être dans le brouillard.

Barda empilé dans la voiture, quelques larmes encore pour quitter Michelle et Jean-Claude qui nous ont hébergés amicalement pour laisser notre appartement propre et en ordre. Un léger détour pour remettre le dernier livre à Jean-Louis et nous pouvions tracer notre route vers le Nord.



Un ultime regard pour voir le ciel bleu sur l’océan à droite et dès que les yeux se sont portés vers les montagnes qui entourent la ville les nuages naissaient à grande vitesse. Ce phénomène m’a toujours intrigué. Nous n’étions pas arrivés encore au péage de l’autoroute vers Casablanca que le ciel pleurait lui aussi.

Le ciel de Tanger n'était pas plus optimiste sur la suite des évènements

D’un trait nous sommes arrivés chez Thérèse au Maylis sur les contreforts de Tanger au Douar Bougdour. Le Maylis, sur la commune rurale Hajr N'Hal ; sa maison tourne le dos à la Zone Franche où elle s’occupe encore de l’avenir de Kapla. Fabuleux jeu de construction en pin des Landes. J’ai eu l’occasion de visiter l’usine et je reste admiratif de la manière dont les lamelles de bois sont sciées avec une précision métallique. Les affûteurs de lames de scies de Kapla ont des secrets qui feraient le bonheur de tous les ébénistes du monde. 


Kapla modèle exerce la créativité des enfants et des grands autant que les jeux électroniques. En plus ils développent la dextérité manuelle pour créer et tenir les équilibres des constructions savantes… 
Vous pouvez en savoir plus  en cliquant sur ce lien ...
youtu.be/87CxRTgbOq0






Thérèse avant de venir nous récupérer au terminal de Tanger avait allumé le feu dans la cheminée. Une attention délicate pour des passagers transis de froid et d’humidité. Depuis Rabat la pluie avait redoublé d’intensité. Le chemin qui mène au Maylis était gorgé d’eau et je me demandais avant d’y arriver comment la voiture pourrait passer…
Nous sommes arrivés par quelques chaos mais les routes se sont améliorées. Le temps de prendre un verre devant de la cheminée et nous avons discuté autour d’une belle table. Thérèse dit souvent qu’elle ne sait pas bien faire la cuisine mais ses repas sont somptueux. Et ses discussions toujours passionnantes, de la vie marocaine et de la vie tout court. Ecologiste sage elle aime la nature et sait en parler avec passion. Elle s’est fait un domaine coquet et passe le plus clair de son temps à l’améliorer. Une étape charmante…
Image de Maylis sous son soleil habituel.... photo Web
Avant de prendre le ferry, nous avions rendez-vous avec Isabelle. Un peu inquiète de voir partir ses relations notre amie. Isa vit à Tanger depuis plus de 20 ans. Elle a été mariée avec un homme du Rif et aime ce pays. Elle se désespère juste de ne pas voir évoluer plus ses habitants. Pour elle, tout bouge dans la ville, mais pas les mentalités des gens qui l’habitent.
Nous avons visité sa maison de campagne sur les hauteurs de Tanger Med, l’énorme port qui sert de porte de l’Afrique. On voit les porte-containers attendre l’autorisation d’entrée du port ou l’arrivée des remorqueurs. 












Un dernier déjeuner dans un restaurant marocain au-dessus de la plage de Ksar Sghir (nous mangions de plus en plus rarement dans les restaurants français ou européens au Maroc) avant de prendre le ferry. Formalités de douanes rapides mais petite remontrance d’une grosse Mercedes qui pense que l’on bloque le passage. J’en ai marre des grosses voitures du pays qui se croient tout permis. Ma façon de répondre bloque instantanément le jeune homme qui descend de la voiture. Les policiers lui font remarquer qu’il doit passer régulariser ses papiers…
Nous nous retrouvons un peu plus tard pour attendre le passage de la voiture au scanner. Opération plus rapide et plus fiable que la fouille traditionnelle. Nous avons des vins du Domaine du Val d’Argan, histoire de les faire goûter pour les fêtes de Noël. Charles Melia a fait faire de grands progrès à toute sa production en 10 ans… Les passagers de la Mercedes noire sont des suédois. Ils habitent l’Espagne et viennent pour la première fois au Maroc. Arrivés le matin, ils ne repartent pas enchantés de leur visite…
Juste avant l'embarquement on a l'impression que Tanger est en feu !!!!
Le ferry part avec presque une heure de retard, la traversée est très mouvementée. La plupart des passagers a le mal de mer. Le personnel de service a des occupations et tout déplacement est problématique. Arrivée à Tarifa sans problème avec le vent et toujours la pluie qui ne cesse pas.





Siegfried nous attend à Riviera pour passer la nuit et déposer nos bagages d’été et les sacs de golf. Nous ne savons pas où nous nous poserons encore. C’est un sentiment particulier et j’aime ces moments d’incertitude. J’attends de prendre une décision et je ne sais encore ce qu’elle sera. Ce n’est pas de la confusion, mais je sais que j’attends un signe, tant que je ne l’aurai pas perçu, rien ne se passera. Cela surprend aussi bien Françoise que mes autres amis, mais c’est ainsi. Je sais juste que cela tourne autour du golf. Le livre et le blog font des remous dans les instances de la profession. Je conteste la manière d’enseigner, la manière de conduire ce sport fabuleux. Il va se passer quelque chose pour moi, je suis en attente…Qui vivra verra !


On retrouve Siegfried sous la pluie et il nous montre notre appartement pour la nuit sur l’étroite corniche entre l’autovia de Malaga et la Méditerranée. On peut penser sur cette partie de côte escarpée, que les architectes y ont inséré les maisons avec un chausse pied. Les piscines privées ont des formes bizarres pour épouser les formes ciselées des terrains. Pas beaucoup de pelouses… Une aberration écologique !

Siegfried nous a indiqué son restaurant favori dans le quartier « Los Tres Llaves ». Superbe demeure, cossue et accueillante, cuisine de derrière les fagots et ambiance espagnole. Une dame et ses amis fêtent son anniversaire et un quintet de jeunes gens fait de même avec force plats de viande à la plancha. Parmi eux un très bon chanteur de flamenco, belle ambiance festive. En Espagne du pays basque à l’Andalousie pour une fête on chante et on danse. C’est une tradition.



Petit déjeuner sympa avec Siegfried qui lui a permis d’avancer quelques idées  sur  ses projets. L’appartement  est  cossu et  avec  vue   sur  mer entre deux immeubles. Siegfried  s’occupe  d’immobilier, administrateur compétent, il a amené de beaux projets dans sa vie nomade,  d’Autriche à Paris et le reste  du monde  avant de se poser à  Fuengirola. Il connait les règles de  l’immobilier  en time  sharing  comme sa poche. Dommage que la plupart des français n’aiment pas ce  principe  apprécié des anglo saxons et des américains en particulier.
Dans nos discussions, je sens bien qu’il aimerait que l’on fasse un deal ensemble et pour tout dire cela me tente. Plus facile de s’implanter dans un nouveau pays entre amis. Les clés d’intégration sont plus vites trouvées. La région est habitée par peu de français. Anglais, allemands et hollandais occupent les lieux. J’ai besoin de ma faire connaître de deux ou trois golfs de classe différentes. Je sais d’avance que nos amis viendront nous voir plus nombreux ici qu’au Maroc. Je sais qu’ici il faudra un appartement plus grand…Les contours du projet auprès de Siegfried se dessinent. Je ne sais pas encore si ce sera le bon.
Au matin, premier regard vers le ciel.... Pas très engageant
Les quelques rayons de soleil du matin ont été chassés par le vent et la pluie se remet à tomber sur la route de Murcia. Les nuages sont accrochés aux montagnes qui dominent la mer. Ils s’enroulent en volutes gris clair et anthracite comme le montrent les images de télévision. Plus on avance et plus l’horizon se bouche. Si notre destination n’était pas proche, il faudrait s’arrêter. Peu de monde sur l’autoroute mais pas possible de rouler à plus de 90km/h.











En de nombreux endroits nous découvrons " el mar del plastico" comme l'appel les journaux..... sur la carte toutes les parties blanches ou grise sont des toiles plastique des serres qui protègent les cultures. Cela dénature complètement les paysages entre mer et montagne et ce phénomène est particulièrement présent dans la région d'Almeria.
    
Los Cazares est en vue, on passe les premiers domaines de golf en se disant que l’on viendra demain prendre les informations dont nous avons besoin pour notre futur projet… Trouver l’hôtel Blue Sense Mar Menor n’est pas simple. Il est collé à la mairie du village entre colline et mer à quelques pas de la plage. Les rues sont étroites comme toujours dans les villes en Espagne. Dans la rue Los Luissos où il est sensé se trouver, les personnes que je rencontre sous mon immense parapluie alors que je me trempe les pieds tellement il pleut ne le connaissent pas. Pas de boutique ouverte sauf une pizzeria. Le serveur m’indique enfin où se trouve le Blue Sense.
 
L’hôtel est tout neuf, ouvert en juillet dernier. Ce qui m’a intéressé dans son choix sur Booking, c’est qu’il a un parking sécurisé. La voiture est pleine, pas envie de la laisser dans la rue sans surveillance. L’entrée du parking est plutôt abrupte, d’abord celui de la mairie puis celui de l’hôtel, fermé par une large porte grillagée. Une prison ou un tabernacle…

Formalités rapides et chambre au 4ème étage, enfin à l’abri ! Dehors il tombe des hallebardes et l’orage gronde en tournant accroché aux montagnes. On dirait qu’à chaque tour des nuées, il prend un peu plus d’intensité. On s’installe tranquillement et l’on va dîner. Menu simple, pas grand monde ce dimanche à l’hôtel mais les personnels sont très agréables avec nous.
En remontant, nous avons repris nos marottes. Françoise étudie l’espagnol avec une grande régularité journalière et j’ai toujours un texte en train pour les blogs. A peine a-t-elle levé la tête pour écouter la pluie et me dire que je devrais remonter la voiture. Mais la laisser dans la rue ? Où, sans sécurité pour le contenu ? Je n’en savais rien. Même pas idée de remonter les valises rangées dans le coffre. 
Nous nous sommes endormis bercés par les interruptions électriques. Les architectes ont posé les tableaux en sous-sol et ce sont les premiers qui ont grillé avec l’eau qui montait certainement.

Au réveil, à la pointe du jour, le torrent qui descendait des montagnes était dans toutes les rues. Le parking entièrement noyé. Pas d’électricité et la réception de l’hôtel dans l’eau. Heureusement le bar et le restaurant sont au premier étage. La pauvre réceptionniste était bloquée, la Guardia Civil ayant interdit toute sortie dans la rue. Elle savait déjà que sa maison était perdue et ses deux voitures aussi. Spectacle irréel, désolation totale.

2 Vidéos explicites.....


Entrée du parking...




Le patron de l’hôtel a fait comme il a pu pour nous être agréable. Une seule solution, attendre la décrue. Nous avons partagé avec les autres clients le contenu des frigos de la cuisine pendant deux jours. Pas d’eau chaude, pas de café, diète. Voilà pourquoi avec un peu d’expérience j’ai fait mettre dans chaque maison construite au Maroc avec les derniers équipements électriques, un point de chauffage au gaz. Pratique, même si ce n’est pas essentiel. 







L’équipe de l’hôtel était dépitée, tandis que l’eau continuait de dévaler vers la mer en changeant sa couleur. La boue liquide de glaise courait en un torrent violent, arrachant les carrelages et les obstacles qui la gênaient.  Elle jouait avec les autos qui se trouvaient sur son passage. Dans le parking une a fait bouchon de liège. 
La sortie du parking où se trouvait ma voiture vomissait ses litres d’eau. En regardant le spectacle je me rappelais que le vendeur m’avait dit que j’achetais une voiture destinée au marché espagnol. Elle va y finir sa vie…

Visite d'une ville sinistrée..... https://youtu.be/bzIg0YBbVGQ

Lundi matin je pouvais contacter mon courtier à Tarbes pour la déclaration de sinistre et me faire préciser les procédures de rapatriement et de sauvetage de la voiture. Mondial Assistance est bien démunie pour rapidement agir. Entre préparation du dossier et informations erronées mardi matin rien n’avait été prévu pour nous ramener à Prades ou même à Lyon. 
Entre temps à l’hôtel pas d’eau, pour se laver à part les bouteilles d’eau minérale. La toilette du chat est vite faite. Trois jours sans se laver nous avons perdu l’habitude. On a l’impression d’empester l’atmosphère. Sombres perspectives…
Devant l’évidence des difficultés à résoudre rapidement nos problèmes, on a décidé de se débrouiller seuls. Taxi vers l’aéroport d’Alicante pour constater que les avions ne sont pas légion pour aller à Lyon. Au mieux le lendemain en passant par …Southampton. Le jour même pour Madrid, billet à 900€ chez Iberia. Je ne comprends pas le mode de vente des compagnies aériennes. Sauf à nous dire qu’elles ne veulent pas de nous !
Location d’une voiture pour rentrer à Prades dans la soirée, au pays de Pau Casals. La route a été faite d’un trait avec un peu de soleil mais encore beaucoup de pluie. Barcelone subissait la même averse que celle que nous avions eue deux jours avant. Mais les malheurs étaient derrière nous.
La vie reprenait son cours à Prades pour s’occuper de la maman de Françoise… Pas de regret une autre forme d’aventure comme il ne nous en est jamais arrivé. 



Michel Prieu

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