La langue de terre qui ferme la lagune est longue et étroite. Sur le côté Ouest l’océan bat ses flancs à vagues puissantes et répétées. Le calme côté lagune où seul le vent pousse l’eau vers le large.
L’activité de Dakhla se développe non pas tellement vers le tourisme mais vers l’industrie de la pêche. Le réchauffement climatique a des incidences ici aussi. Les bancs de poissons descendent le long de la côte d’Afrique. Safi perd le sens de sa vie et Dakhla devient un port important. Les conserveries nouvelles se dressent ici maintenant, un peu plus modernes. On parle russe, portugais, espagnol et chinois dans les rues de la ville.
Ce matin, un peu secoué par une nuit agitée, le réveil est difficile pour tous. Nous allons à l’extrême pointe de la langue de terre. C’est le jour du Mouloud, la fête de la naissance du prophète, le « Noël » des musulmans pour faire simple. Pas une âme en ville alors qu’il est 10 heures.
Le guide prend son temps pour passer le centre et la zone industrielle. On longe le terminal pétrolier au loin dans la lagune. La dernière fois que j’ai vu La Sarga, le village de baraques était presque vide, les pêcheurs étaient en mer. J’avais un souvenir impressionnant. C’est un village d’hommes, angoissant à regarder. Plusieurs villages de toile et de tôles sont nés dans le sud marocain depuis quelques années.
Ce matin pas d’activité, recueillement et repos. Toutes les barques sont alignées. Les tracteurs à l’arrêt. Nous avons pu prendre des photos à nulle autre pareilles. Pas sûr qu’en temps normal d’activité nous ayons été autorisés à les prendre.
Même les oiseaux sur le bord de l’eau sont calmes. Les « compagnies » de goélands et de mouettes partent en criant sur notre passage. Au loin quelques pêcheurs à la ligne dans le vent sec de ce matin et des flamands roses qui posent encore et toujours.
Le soleil n’est pas généreux pour éclairer les bateaux qui attendent à l’entrée du port. Certains font du transbordement ou des réparations, trop loin pour savoir.
On a eu tout le temps de regarder les bateaux, barques de pêche en mer solides à défaut d’être confortables. Pointues et hautes sur l’avant pour affronter les vagues. Pas de voile mais un moteur hors-bord pour la manœuvrer. Elles forment des rangées innombrables dans le soleil intermittent. Plusieurs bateaux sont en bon état. Quelques bateaux sont neufs et attendent d’être équipés. Le village me semble plus vivant que lors de ma dernière visite.
La pêche du moment, c’est le poulpe. C’est d’un bon rapport. Il se vend cher sur le marché. Tous les bateaux sont chargés des tubes de pêche. On dirait des vestiges de munitions attendant l’embarquement.
On imagine une vie dure dans le village. On le pense organisé, bien que sommaire et insalubre. La sécurité ne règne pas en maître et le plan d’urbanisation du village est inexistant. Pas sûr que l’on y parle une seule langue, pas de femmes, pas d’enfants…Un repère pour clandestins aussi sans doute. Un havre pour manger et survivre. La zone est poissonneuse, pour des hommes solides et volontaires de quoi manger en attendant des jours meilleurs. On ne saura jamais. Que cela reste secret. Les images parlent d’elles-mêmes : une fin de monde.
Retour par l’océan, les yeux vers le continent américain et des images de voyage qui défilent comme chaque fois que je me trouve sur un bord de mer. L’océan s’active pour battre les rochers. Je le soupçonne de vouloir rejoindre la lagune plus calme…
Le phare habillé comme un bagnard fait son travail de vigie et compte les nuages qui défilent rapidement. Le temps d’aller voir les surfeurs s’ils sont plus courageux qu’hier.
La lagune est sous les alizés. Nous avons de la chance, Eole est calme pour notre venue de ce début décembre. Il change de sens dans la journée avec la marée et le soleil qui chauffe. Aux autres saisons, il est violent et anime alors la lagune plisse ses vagues et l’écume domine les crêtes de chacune. J’ai vu des surfeurs rentrer du spot de la fin de la lagune vers Dakhla à la voile. Une belle promenade au milieu du désert de pierre et de sable. Une performance sportive aussi en n’en pas douter.
Il est marrant de voir les surfeurs se préparer. D’abord au sec pour apprivoiser la toile et le vent. Puis ensuite dans l’eau jusqu’aux genoux et quand ils se laissent emporter le plongeon n’est pas loin.
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Ils pourraient être tractés par le seul vent et faire du ski nautique sur le ventre. La lagune est très plate et cela est facile pour se relever et repartir pour les débutants. Nous avons vu les premiers pas sur une planche, d’abord de surf. Ceux qui veulent faire des figures aériennes prennent des planches avec des « semelles » pour sauter ou …voler. Très sportif ce jeu-là.
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Les Camps sont maintenant très nombreux, l’UCPA a multiplié ses logements pour les amoureux du vent et de l’eau, l’ancêtre des camps publics a meilleure allure qu’il y a quatre ans. Océan Vagabond, Dakhla attitudes se disputent les clients du monde entier maintenant.
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Et toujours les innombrables camping-cars ou motor-home que l’on voit au bord de l’eau sur tous les sites de surf et au Maroc ils sont alignés en rangs serrés. La vie y est moins chère et à Dakhla tout particulièrement.
Nouveau déjeuner chez Thalamar pour se goinfrer d’huîtres encore et des poissons et coquillages de la lagune. C’est établissement est surprenant, une belle idée mais pas tout à fait dans les normes hygiéniques que l’on pourrait aimer en Europe.
Si vous voulez être dépaysés venez faire un tour à Dakhla, cela ne ressemble à rien de ce que vous connaissez. Entre Moyen-âge et XXIème siècle, un raccourci du Maroc.
Le siècle présent nous attendait à l’aéroport dans un avion toujours plein. Je plains les amis d’Europe qui pensent que le Maroc est un pays sous développé et qui ont peur d’y venir. J’ai pris quatre fois cet avion pour Dakhla et il est toujours plein de gens colorés et de toutes nationalités. Les femmes en particuliers sont remarquables dans leurs voiles imprimés multicolores façon sari. Elles sont maquillées comme à Paris pour une soirée et s’occupent de leurs enfants comme chacun de nous. Je crois deviner aux yeux de certains petits qu’ils sont surpris de trouver des « gaouris » (étranger en derija) dans leur bus aérien. C’est avion, c’est bien cela ; dans les étapes circulaires entre Casablanca et Casablanca, il dessert Marrakech, Agadir, Dakhla et Layoune en se vidant presque et en reprenant autant de passagers à chaque étape. C’est un message d’espoir pour le Maroc et une preuve supplémentaire de son évolution. Je suis heureux d’avoir connu cette destination…
Michel Prieu
Photos Françoise Devillechabrolle
Nic dodać, nic ująć.Dakhla jest fascynująca. Za parę lat będzie kurortem na wysokim poziomie.
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