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INTERMEDE BLANC : 1 - Nouveau baptême

A dire vrai dans mes pérégrinations de voyage, je ne savais pas où c’était Arêches. Beaufort sonne mieux grâce à son fromage. Quant au cul de sac du Planay, je n’en avais entendu parler que parce que mon aîné Fabrice, prend avec sa petite famille et ses amis une semaine à la neige hors des vacances scolaires dans ce coin des Alpes.

Pour un Pyrénéen, fils de la « Frontière sauvage », les Alpes, c’est la Mecque des skieurs. Tous les grands champions sont de là. Mêmes les valeureux pyrénéens Mir, Famose jadis, Théaux maintenant ont dû s’expatrier comme moi pour suivre leur étoile… Les neiges du sud sont aléatoires.



Je n’avais pas fait de ski depuis 40 ans et j’avais besoin de calme. Le Planay s’est imposé naturellement. Pourquoi ? Je ne voulais pas réapprendre la montagne dans une usine à ski au milieu des immeubles en béton. Je connais les Alpes et ses habitants pour y avoir travaillé et aimé leur histoire industrielle dans les années 90. Pour son Histoire Olympique aussi et les champions qu’elle a sacrés. 

Dans les vallées des Alpes, j’aime la forme des chalets hérités des fermes anciennes perchés sur les pentes abruptes qui dominent les sillons ouverts au milieu des pics. Pyrénéen, je laisse la voiture et au bout du parking, je grimpe à la barrière. Dans les alpages, la marche d’approche est parfois longue pour gagner le sommet ou le lac de son choix. De Gap à Grenoble, de Cluses à Genève, de Chambéry ou Aix les Bains, à chaque virage, on lève les yeux pour chercher à voir le Mont Blanc, c’est le phare des Alpes de France.

Le Planay me l’a offert comme jamais, avec une majesté amicale. Je suis arrivé par route sèche, étonné de voir encore les pentes sud vertes comme je ne l’attendais pas. La neige surprise de novembre passé avait fondu au soleil. Les pentes nord avaient quelques vestiges de névé mais sur les pistes les canons avaient fait leur ouvrage.




Le paysage était tout nu en arrivant au Nid d’Aigle de Monique et Yves Cornu. J’ai posé la voiture au pied des pistes et j’ai humé l’air calme du fond de vallée. Les blocs rocheux se découpent en vallées successives offrant aux amoureux de la montagne les chemins que chacun aime à courir. La montagne c’est toujours un choix et donc une invitation à être libre. Cela trempe le caractère. J’en étais là de mes réflexions quand j’ai rencontré Yves en pleine rue. 
Je voulais être au calme, je laisse derrière moi 15 ans de vie où le Maroc a tenu une grande place. D’autres projets m’attendent. Lors de nos premiers contacts Yves et Monique, m’avaient proposé leur dernière création. Yves l’a construit de ses mains. Il trône au-dessus du ruisseau qui descend des vallons. J’en serai le premier occupant, un honneur sans doute, mais ma surprise fut d’entrer dans un écrin. Celui que vous chercheriez chaque fois que vous voulez faire plaisir à un amour.
Posé à côté du Nid d’Aigle, au-dessus du torrent du Mirantin. A peine entré dans le petit chalet, le cœur est partout, sculpté dans la beauté du bois, les céramiques et les plats, le linge de maison. Jusque dans la marmotte qui sert de salière et sa complice le poivre avec un bouquet… Monique et Yves ont mis tout leur cœur à l’aménager, son nom est tout trouvé, ce sera « Chalet de cœur », ils le méritent, il leur ressemble.


 










Une fois tout rangé, je ne savais que faire… je ne vous ai pas tout dit. J’étais inquiet pour mes activités sportives. J’avais fait du vélo et de la marche mais pour refaire du ski, je ne savais pas sur quel pied danser. Je connais bien le dicton « le ski c’est comme le vélo, une fois que l’on sait monter, cela ne se perd pas ». J’ai l’air gonflé comme cela mais le doute, ça fait des ravages. Pour me donner une contenance j’ai garé la voiture pour ne plus y toucher de la quinzaine.
Pour la neige je ne m’en faisais pas, j’ai confiance dans ma capacité à avoir le temps qui me convient où que je me trouve ; je ne plaisante pas, lisez mes écrits de voyage, partout où je vais j’ai le temps idéal pour passer de bons moments. 

Alors je suis parti louer les skis et les chaussures et…le casque ! Wouahhh, quelle découverte ! Je n’étais pas au bout de mes surprises… J’avais loué pour profiter d’une promotion de la centrale Skiset. Les jeunes de la boutique avaient préparé tout mon dossier. J’ai eu l’impression d’avoir des skis de nain. Les derniers Dynastar que j’avais utilisé mesuraient 2,10m. Les marques n’ont pas changé mais les planches sont devenues plus conviviales, comme les clubs de golf. Pour les chaussures, pareil un bloc rigide mais l’impression d’être dans les pantoufles. Skiset et Gaspard II ont fait assez remarquablement leur boulot.

J’étais paré, mais toujours inquiet et je ne savais toujours pas comment j’allais m’y prendre. Il était quinze heures passées et j’avais tout d’un coup faim. Un écriteau m’avait attiré l’œil « vin chaud » chez Tonton au Télémark. Ce nom avait ouvert mes images intérieures. Sacrée façon de faire du ski. A cette technique de ski, je ne sais pourquoi j’y associe l’image d’Emile Allais. Peut-être parce qu’il a cassé cette technique pour en adopter une plus efficace pour devenir un champion de légende et le premier enseignant du ski français. 
Le génie français se niche partout dans notre pays, il n’y a que les français pour l’ignorer. Ce sera le regret de ma vie si je devais en avoir un que les français passent à côté de la chance qu’ils piétinent. C’est mon credo pour les jours et les années qui viennent. Il faut juste que l’on n’ait plus peur de notre ombre, que l’on ait simplement confiance en nous…
La montagne c’est aussi l’occasion de ne manger comme nulle part ailleurs, il y fait froid et il faut des calories. J’ai opté malgré l’heure tardive pour une galette campagnarde et un vin chaud. Le dernier que j’avais bu remonte à plus de 50 ans, merci Tonton. Je sais aussi que je pourrai manger une fondue et une raclette, mais je fais attention au fromage de vache, je lui préfère la finesse du lait cru des brebis et celui des biquettes. 


Au chaud, à côté du Nid d’Aigle ce dimanche soir, je n’ai pas bien dormi, j’étais inquiet…


Michel Prieu

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